Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/16

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il en reste un jugement moral, identique dans tout le peuple (ou la presque totalité), jugement très ferme et très précis.

Étendez, je vous prie, cette enquête. Consultez des gens de toutes sortes, — non pas seulement des ouvriers (plusieurs sont déjà des lettrés plutôt que du peuple), — non pas des femmes seulement (leur sensibilité parfois les égare), — mais des personnes diverses d’âge, de sexe, de condition ; écartez les diversités accessoires, prenez le total des réponses ; voici ce que vous trouverez, ce qu’on pourrait appeler le catéchisme historique du peuple :

Qui a amené la Révolution ? Voltaire et Rousseau. — Qui a perdu le roi ? La reine. — Qui a commencé la Révolution ? Mirabeau. — Quel a été l’ennemi de la Révolution ? Pitt et Cobourg, les Chouans et Coblentz. — Et encore ? Les Goddem et les Calotins. — Qui a gâté la Révolution ? Marat et Robespierre.

Telle est la tradition nationale, celle, vous pouvez vous en convaincre, de toute la France. Ôtez-en seulement quelques écrivains systématiques, et quelques ouvriers lettrés, qui, sous l’influence de ces deux systèmes, et cultivés depuis vingt ans par une presse spéciale, sont sortis de la tradition commune à la masse du peuple : en tout, quelques milliers d’hommes, à Paris, à Lyon, dans trois ou quatre grandes villes ; nombre peu considérable, en présence de trente-quatre millions d’âmes.

Le catéchisme historique que nous venons d’indiquer est celui de tous les habitants des campagnes,