Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/178

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nationales ayant cessé, le monde sans espoir voyait s’affermir l’Empire éternel.

Certes, s’il est une situation contraire à celle de 1789, c’est celle-là. Rien n’était plus étrange que de chercher dans cette légende de résignation le code d’une époque où l’homme a réclamé son droit.

Le chrétien est cet homme résigné de l’ancien Empire, qui ne place aucun espoir dans son action personnelle, mais croit être sauvé uniquement, exclusivement par le Christ. Il y a très peu de chrétiens. Il y en avait trois ou quatre dans l’Assemblée constituante. Dès cette époque, le christianisme était mort comme système. Beaucoup s’y trompaient, entre autres tels amis de la liberté qui, touchés de l’Évangile, se croyaient pour cela chrétiens. Quant à la vie populaire, le christianisme n’en conservait que ce qu’il doit à sa partie anti-chrétienne, empruntée ou imitée du paganisme, je veux dire à l’idolâtrie de la Vierge, des saints, à la matérielle et sensuelle dévotion du Sacré-Cœur.

Le vrai principe chrétien (que l’homme n’est sauvé que par la grâce du Christ), condamné solennellement par le pape vers la fin de Louis XIV, depuis n’a fait que languir, ses défenseurs diminuant toujours de nombre, se cachant, se résignant, mourant sans bruit, sans révolte. Et c’est en cela que ce parti prouve, autant que par sa doctrine, qu’il est bien vraiment chrétien. Il se cache, je l’ai dit, quoiqu’il ait encore des hommes d’une vigueur singulière, qu’il gagnerait à montrer.