Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/240

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aveugle, qui tout à l’heure dansait avec tant d’insouciance, entre son triste passé et son formidable avenir, ne vous fait-il pas pitié ?… Pourquoi dans vos beaux yeux bleus cette douteuse lueur ? Un royaliste l’a saisie : « Voyez-vous la magicienne ? » disait le comte de Virieu… Vos yeux ont-ils donc vu d’ici votre envoyé qui maintenant reçoit à Nice et félicite l’organisateur des massacres du Midi ? Ou bien, dans ces masses confuses, avez-vous cru voir de loin les armées de Léopold ?

Écoutez !… Ceci, c’est la paix, mais une paix toute guerrière. Les trois millions d’hommes armés qui ont envoyé ceux-ci ont entre eux plus de soldats que tous les rois d’Europe. Ils offrent la paix fraternelle, mais n’en sont pas moins prêts au combat. Déjà plusieurs départements, Seine, Charente, Gironde, bien d’autres, veulent donner, armer, défrayer chacun six mille hommes pour aller à la frontière. Tout à l’heure les Marseillais vont demander à partir, ils renouvellent le serment des Phocéens leurs ancêtres, jetant une pierre à la mer et jurant, s’ils ne sont vainqueurs, de ne revenir qu’au jour où la pierre surnagera.