Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/303

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Tout cela ensemble faisait des Jacobins une classe d’hommes âpre, défiante, très ardente et très contenue, plus positive et plus habile qu’on ne l’aurait attendu de leurs théories peu précises.

Quoique les vieilles jalousies, les ambitions nouvelles, aient été un puissant aiguillon pour eux, quoique les intrigues de divers partis aient exploité ces sociétés, leur caractère en général, très fortement exprimé dans l’exemple que nous avons cité, est originairement celui d’associations naturelles, spontanées, formées par une véritable religion patriotique, une dévotion austère à la liberté, une pureté civique fort exigeante et tendant toujours à l’épuration.

Quel était le symbole de ces petites églises ? Cette foi ardente avait-elle un credo bien arrêté ? Non, très vague encore, alliant, sans s’en douter, les principes contradictoires. Tous, presque tous royalistes, à cette époque, et pourtant fort aigres avec le roi. Tous dominés par Rousseau, par le fameux principe de la philosophie du siècle : Revenez à la nature. Et néanmoins, avec cela, plusieurs se croyaient chrétiens, se rattachaient, au moins de nom, à la vieille croyance qui condamne la nature, qui la croit gâtée, déchue.

Cette contradiction même, cette ignorance, cette foi au principe nouveau peu approfondi encore, a quelque chose de respectable. C’est la foi au dieu inconnu. Et cette foi en eux n’est pas moins active. Elle élève, fortifie les âmes. Comme leur maître Rousseau, ils élèvent leurs regards, dirigent leur