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homme sans nous dégrader nous-mêmes, sans découronner la France.

Le temps, qui révèle tout, n’a d’ailleurs rien révélé qui motive réellement le reproche de trahison. Le tort réel de Mirabeau fut une erreur, une grave et funeste erreur, mais alors partagée de tous à des degrés différents. Tous alors, les hommes de tous les partis, depuis Cazalès et Maury jusqu’à Robespierre, jusqu’à Marat, croyaient que la France était royaliste, tous voulaient un roi. Le nombre des républicains était vraiment imperceptible.

Mirabeau croyait qu’il faut un roi fort ou point de roi. L’expérience a prouvé contre les essais intermédiaires, les constitutions bâtardes qui, par les voies de mensonges, mènent aux tyrannies hypocrites.

Le moyen qu’il propose au roi pour se relever, c’est d’être plus révolutionnaire que l’Assemblée même.

Il n’y eut pas trahison, mais il y eut corruption.

Quel genre de corruption ? L’argent ? Mirabeau, il est vrai, reçut des sommes qui devaient couvrir la dépense de son immense correspondance avec les départements, une sorte de ministère qu’il organisait chez lui. Il se dit ce mot subtil, cette excuse qui n’excuse pas : qu’on ne l’avait point acheté, qu’il était payé, non vendu.

Il y eut une autre corruption. Ceux qui ont étudié cet homme la comprendront bien. La romanesque visite de Saint-Cloud, au mois de mai 1790, le troubla du fol espoir d’être le premier ministre d’un roi ?