Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/488

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

combattait par l’idée qu’il appelait en même temps l’Espagne son cousin.

Il était encore étranger, par un sentiment extérieur (supérieur à ses yeux) à toute nationalité : étranger de religion. Pour le chrétien, la patrie est une chose secondaire. Sa vraie, sa grande patrie, est l’Église, dont tout royaume est province. Le roi très chrétien, oint par les prêtres au sacre de Reims, lié par le serment du sacre et n’en étant pas délié, jugeait nul tout autre serment. Quoiqu’il connût très bien les prêtres et ne les eût pas toujours écoutés, ici il les consulta ; l’évêque de Clermont le confirma dans l’idée que l’atteinte aux biens ecclésiastiques était sacrilège (mars 1790 ?), le pape, dans l’horreur que lui inspirait la constitution civile du Clergé (septembre 1790). L’évêque de Pamiers lui apporta le plan d’évasion (octobre), et la nécessité où il fut de sanctionner le décret du serment des prêtres (26 décembre), leva en lui tous scrupules. Le chrétien tua le roi, le Français.

Sa faible et trouble conscience se repaissait de deux idées, celles dont nous avons parlé au commencement de ce chapitre : 1o il croyait ne pas imiter Jacques II, ne pas quitter le royaume ; 2o ne pas imiter Charles Ier, ne point faire la guerre à son peuple. — Ces deux points évités, ceux que l’histoire d’Angleterre lui avait mis dans l’esprit, il ne craignait rien au monde, se reposant tacitement sur la vieille superstition qui a enhardi les rois à tant de démarches coupables : « Que m’arriverait-il, après tout ? Je suis l’oint de Dieu. »