Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/203

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faisait disparaître beaucoup d’articles que l’Assemblée avait votés. De là une vive aigreur entre les constitutionnels eux-mêmes. L’Assemblée plus d’une fois vota contre ses comités. Un député ayant dénoncé « les omissions graves que les vrais amis de la liberté croyaient apercevoir », un orage s’éleva, et Barnave s’exaspéra au point d’offrir sa démission.

La revision devint un spectacle pitoyable. Cette noble Assemblée, qui, malgré toutes ses fautes, n’en reste pas moins si grande dans l’histoire, offrit cet enseignement à l’humanité que vivre au delà de sa vie, c’est une chance terrible de honte, d’inconséquence, de démenti à soi-même.

Surprise en flagrant délit d’aristocratie et de royalisme, tantôt par omission et tantôt par commission, elle constata tristement son envie timide de rétrograder, et le manque de courage qui l’empêchait d’aller en arrière tout aussi bien qu’en avant. L’audace qui parut par moments dans quelques discours de Barnave n’eut pas un heureux succès. Robespierre envisageant le roi comme simple fonctionnaire et lui refusant le titre de représentant de la nation, Barnave soutint que le fonctionnaire ne pouvait qu’agir pour la nation, mais que le représentant de plus pouvait vouloir pour elle. De là il déduisait l’inviolabilité du représentant royal. Cette distinction, trop claire, eut précisément le tort de mettre la question à nu, compromit la royauté, rendit les esprits irréconciliables avec un pouvoir qui voulait à la place de la nation.

La volonté royale, à vrai dire, était bien impuis-