Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/507

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présence d’esprit : « J’ai fait ouvrir les appartements ; le peuple, défilant du côté de la galerie, aura le plaisir de les voir. »

La curiosité entraîna beaucoup de gens. La salle se vidait déjà lorsque arriva une députation de vingt-quatre représentants. Le roi leur dit : « Je remercie l’Assemblée ; je suis tranquille au milieu des Français. » Et, répétant le geste qu’il avait fait d’abord, il prit la main d’un garde national, la mit sur son cœur et dit : « Vous le voyez, je suis tranquille. »

Alors, entouré de députés, de gardes nationaux, protégé par leur commandant, il se dirigea brusquement vers une porte dérobée, tout près de la cheminée, s’y jeta. Elle fut sur-le-champ refermée sur lui.

Un peu après, la reine montrait à la députation l’état effroyable de l’appartement, les portes brisées. Elle s’aperçut qu’un député, l’ardent Merlin (de Thionville), avait les larmes aux yeux. Il s’en excusa vivement : « Je pleure, oui, Madame, je pleure, mais sur les malheurs d’une femme sensible et belle, d’une mère… Ce n’est pas sur la reine. Je hais les reines et les rois. Telle est ma religion. »

Le roi, rentré dans ses appartements, gardait, sans s’en apercevoir, le bonnet rouge qu’il avait pris. Ce bonnet, trop petit pour entrer dans sa tête, était resté sur ses cheveux. On le lui fit remarquer et rien ne lui fut plus sensible ; il le jeta violemment à ses pieds, s’indignant, dans cette journée, où du reste il fut héroïque, de retrouver sur lui ce signe de duplicité.