Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/131

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le moindre domaine public, pas plus qu’il n’avait manié un seul denier de l’État. Il surveillait, voilà tout. Il était, si on peut le dire, censeur général des finances, l’œil impitoyable et sévère, toujours ouvert sur les comptables, fournisseurs, etc. Ces mots, parfaitement inexacts, administration et domaines, étaient habilement combinés pour éveiller les imaginations. Rien que de vague, il est vrai, nulle accusation précise. Mais le commentaire venait assez de lui-même ; le public pouvait l’ajouter : « Robespierre ne dit pas tout ; on voit qu’il ménage Cambon. N’importe, on devine sans peine qu’un homme qui administre toute la richesse publique ne doit pas s’y appauvrir… » Hypothèses d’autant plus naturelles que ce reproche d’administrer arbitrairement les domaines était précédé de bien près par le mot déprédations, à deux lignes de distance.

Tout cela n’est pas sans art. Employer le fer et le feu pour renverser un grand chêne, c’est un procédé grossier, c’est faire du bruit, de l’éclat. Celui qui saurait en passant lui mettre un ver à la racine aurait travaillé bien mieux. Il pourrait suivre son chemin et vaquer à ses affaires. Le ver n’en irait pas moins, et tacitement, doucement, accomplirait à la longue l’œuvre de la destruction.

La lettre conseillait encore, si l’on voulait des économies, « de fixer des bornes sages à nos entreprises militaires », rentrant ainsi dans l’inintelligente