Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/158

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sans autre témoin que son compagnon ordinaire de forge, fabriqué une porte de fer qui, recouverte elle-même d’un panneau de boiserie, fermait la cachette. Le compagnon, d’esprit faible, ne put porter ce grand secret. Il y avait toujours eu d’anciens contes populaires de princes qui faisaient disparaître le dépositaire d’un secret, l’enfouisseur d’un trésor. Tout cela apparemment lui vint en mémoire ; il ne dormit plus, languit. Il s’imagina que le roi avait pu lui jeter un sort ou l’avait empoisonné. Il se rappelait en effet qu’un jour, le roi, le voyant altéré, lui avait versé à boire de sa propre main ; dès ce jour, il avait commencé à dépérir. Sa femme le confirme dans cette pensée. Il veut se venger au moins avant de mourir ; il court chez le ministre de l’intérieur, lui dévoile tout.

M. et Madame Roland crurent qu’il n’y avait pas une minute à perdre. Ils n’appelèrent personne, n’associèrent personne à la découverte. Roland courut aux Tuileries, ouvrit l’armoire mystérieuse, mit les papiers dans une serviette et revint les verser sur les genoux de sa femme. Après un examen rapide entre les deux époux, après que Roland eut pris note de chaque liasse et inscrit son nom dessus, alors seulement le fatal trésor fut porté à la Convention (20 novembre).

La conduite de Roland en ceci fut étrange, difficile à justifier : ne devait-il pas se faire assister d’une commission de représentants dans la levée des papiers ? Ne devait-il pas les porter immédiatement