Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/259

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Saintes reliques ! qui ne vous croira ?… Quand on songe que ces choses furent écrites au moment où ces infortunés, se sachant traqués par la meute (à la lettre, une meute de chiens), quittèrent héroïquement leur asile, leur hôte, qu’ils craignaient de compromettre, et s’en allèrent mourir ensemble sous leur seul abri, le ciel !… Nul murmure pourtant, nul reproche. Ils attestent sans accusation, le nom de la Providence.

La Providence a répondu… Cette frêle justification a survécu. Les chiens, en dévorant une partie de leurs corps et déchirant leurs habits, n’ont pas atteint ce pauvre papier, qui n’a que le souffle… Le voilà, il a subsisté, le voilà, sale et rougi, avec ses moisissures, comme exhumé d’un cercueil…

Lâches, osez me dire maintenant que les hommes qui moururent ainsi, dans cette héroïque douceur, ont été des lâches, que la Convention a eu peur, que Roland mort comme Caton, que Vergniaud mort comme Sidney, bégayaient et tremblotaient, aux cris des tribunes… Le bruit, les menaces, ont pu troubler un Barère, un Sieyès, je veux bien le croire. Mais de quel droit, sur quelles preuves, osez-vous bien affirmer que les hommes héroïques de la gauche ou de la droite aient voté par crainte ? Qui croirai-je, en vérité, ou de vous, ennemis acharnés, qui affirmez sans prouver, dans un intérêt de parti ; ou de ces hommes eux-mêmes qui, par leur vie courageuse, par leur mort sublime, nous défendent ces basses pensées ? Vous venez me dire qu’ils ont eu peur