Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/313

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qu’on appelait celle de la civilisation, qui a créé des littératures aristocratiques, des Racine et des Boileau ; — et le grand peuple d’en bas (qui est à peu près tout le monde), abandonné sans culture, presque sans rapport avec l’autre peuple, n’ayant ni éducation commune, ni langue commune, gardant ses patois, priant sans comprendre, sans que l’Église daigne lui expliquer ses prières… Spectacle impie, barbare, qui saisit de pitié et de douleur, pour peu qu’on garde au cœur la moindre étincelle de Dieu !

Finir ce schisme désolant auquel le christianisme a si peu remédié, créer une âme identique dans une foi identique, qui fasse désirer, vouloir l’identité de la loi, c’est là le problème social de la Révolution. La loi suppose une éducation selon le principe de la loi, et cette éducation elle-même implique un fixe principe de foi sociale et religieuse.

Un voile couvrait encore cette profonde question pour les hommes de 1793. Ils marchaient fermes et dévoués, vers leur sublime idéal, la loi souveraine du monde, sans bien distinguer la vaste et ténébreuse région qui les séparait encore de ce but, celle des arts infinis de civilisation et d’éducation qui y mènent et y préparent. Ils en ont entrevu un point, la puissance des fêtes nationales, celle du théâtre, celle de la vie commune pour les jeunes enfants, sans préciser encore l’enseignement qui dominerait cette initiation nationale.

La première tentative d’un plan d’éducation et de vie commune fait la gloire de Lepelletier Saint-