Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/375

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étaient plus impatients, plus prêts à frapper. Il y avait le jeune Varlet qui s’ennuyait de ne tuer encore qu’en paroles ; les lauriers de septembre ne le laissaient pas dormir. Il y avait Fournier l’Auvergnat, ce dur planteur d’Amérique, qui, de nature et d’habitude, aimait à frapper et à verser le sang. Quelques autres se joignent à eux, moins pervers, mais follement furieux, comme le Polonais Lazouski, qui avait brillé au 10 août, et qui chaque matin voulait un 10 août. Bel homme à belle chevelure noire et frisée d’elle-même, il était le héros, l’idole du faubourg Saint-Marceau, et, pour soutenir ce rôle, il ne désenivrait guère.

Cette trinité de sages résolut d’agir quand même, sans faire attention aux remontrances, aux faiblesses de Marat, ni aux ménagements de la Commune. Ils paraissent avoir cru que, si le samedi soir, ils mettaient le peuple en train par quelque scène violente (brisant des presses, par exemple, avant de briser des hommes), il y aurait, le dimanche, de nombreux rassemblements qu’on pourrait électriser ; que le grand repas civique, le vin, les chants patriotiques, pourraient griser cette foule, qui envahirait, peut-être entraînerait les Jacobins. D’autre part, il suffisait qu’on remuât une section, une grande et populeuse section, les Gravilliers, les Cordeliers : on emporterait la Commune, on lui ferait, bon gré mal gré, prendre le pouvoir. La Commune obéissante épurerait la Convention. Les Girondins seraient chassés ou tués… La patrie était sauvée.