Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/390

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laient du sang. Le contraire était exact. Lui-même fit avertir sous main les Girondins qu’on en voulait à leur vie.

L’Assemblée eut bien voulu s’en tenir à une petite mesure, l’arrestation de deux généraux suspects, lorsqu’un membre, qui parlait rarement et s’effaçait volontiers, s’avança ici et prit une grande initiative. Il dit sans emportement qu’il fallait des moyens plus généraux, qu’il fallait, séance tenante, décréter l’organisation du tribunal révolutionnaire.

Ce membre était un légiste estimé, collègue de Cambon dans la députation de Montpellier, aussi modéré que Cambon était violent ; c’était le premier rapporteur du Code civil (août 1793), plus tard le second consul, l’archichancelier de l’Empire, le grave et doux Cambacérès. Il se rapprochait volontiers des hommes qui avaient au plus haut degré la qualité qui lui manquait à lui-même, je veux dire l’énergie virile. De même qu’il devait à une autre époque s’attacher à Bonaparte, ici, en 1793, dans deux moments décisifs, il se tint tout près de Danton. Seul dans toute la Convention, il appuya Danton, au 9 janvier, dans la proposition qui aurait sauvé Louis XVI ; alors il vota pour la vie. Et maintenant, au 10 mars, on peut dire qu’il vota pour la mort, en autorisant de sa parole toujours modérée et calme, toujours agréable au centre, la sinistre proposition du tribunal révolutionnaire. Et il ajouta du même ton : « Tous les pouvoirs vous sont confiés, vous devez les exercer tous ; plus de séparation entre le corps délibérant et