Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/438

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Suspendu ainsi entre la coalition et la France, n’ayant en mains que la Belgique, qui lui était disputée par l’influence révolutionnaire, Dumouriez se fît Belge, en quelque sorte, prit les intérêts des Belges ; il écrivit pour eux un violent manifeste, sous forme de lettre à la Convention. Il l’écrivit, le 12, à Louvain, et il eut soin d’en faire courir des copies.

C’était l’acte d’accusation de la Convention et de la France. Tout ce que disait l’ennemi contre nous était proclamé ici par une bouche française, par notre général même. Comme l’Autrichien, il disait que la demande de la réunion à la France n’avait été obtenue des Belges, arrachée qu’à coups de fusil. Comme la Banque, il disait que Cambon n’avait voulu que ruiner la Belgique, absorber son or, pour des assignats. Comme les prêtres, il se lamentait sur l’argenterie des églises enlevée pour les frais de la guerre, la violation des tabernacles, l’effusion des hosties répandues à terre. Dans ce pieux manifeste, fort bien combiné pour les Belges, le roué montrait dans nos revers une punition de nos crimes : de tout temps, il y a eu une récompense des vertus et une punition des vices, etc. À ce compte il ne fallait pas se battre ; c’était tenter la Providence. Le bâton du caporal autrichien était la verge de Dieu.

Cette perfide capucinade arriva le 14 au soir. Le Girondin Gensonné, qui présidait la Convention, fut terrifié et crut d’abord devoir montrer la lettre