Page:Michelet - OC, Les Femmes de la Révolution, Les Soldats de la Révolution.djvu/482

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
480
LES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION

renoncer à l’intention d’écrire quelques pages sur Rome. Je l’ai depuis longtemps vivement désiré, et je vous supplie de le faire. Vous nous avez parlé de la Rome du passé en maître ; parlez-nous de la Rome de l’avenir, de la Rome du peuple. Je l’ai pressentie par le cœur il y a vingt ans, quand tout le monde hochait la tête en m’appelant rêveur. Et maintenant, il n’y a pas un seul Italien digne de ce nom qui n’y entrevoie un troisième monde, venant se superposer aux deux mondes antérieurs et plus grand qu’eux. Qu’une voix de Français salue ce monde au berceau ! et que cette voix soit la vôtre !

« Comme de simples pressentiments, des lueurs d’avenir, parcourez les actes officiels de la République romaine ; lisez quelques pages qu’Accursi vous signalera çà et là dans l’Italia del Popolo ; lisez les chants de Mameli ; songez à cette formule « Dieu et le Peuple » supprimant tous les intermédiaires entre la révélation divine et l’humanité ; rappelez-vous qu’elle s’est instinctivement, sans concert, sans contact, échappée simultanément du sein de Rome et de Venise ; comparez ce qui, sous notre drapeau de religion républicaine, a pu se développer en fait de courage, de force et de dévouement au cœur du peuple, avec les efforts impuissants des bataillons et des parcs d’artillerie monarchiques dans la campagne lombarde ; — je suis sûr que l’inspiration ne vous manquera pas ! Rome et Venise transformant les Transteverini et les Arsenalotti en héros sous le même drapeau, c’est l’unité italienne remplaçant le vieux dualisme guelfe et gibelin du Pape et de l’Empereur. Engagez-vous pour nous. Croyez-moi ; nous tiendrons votre engagement.

« Écrivez-moi si, de quelque manière que ce soit, je puis vous venir en aide dans votre tache.

« Votre ami dévoué,
« Joseph Mazzini. »



FIN DES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION