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LES FEMMES DE LA RÉVOLUTION

menèrent aux Halles et injurièrent les poissardes. Celles-ci tombèrent sur elles, et, de leurs robustes mains, leur appliquèrent, au grand amusement des hommes, une indécente correction. Paris ne parla d’autre chose. La Convention jugea, mais contre les victimes ; elle défendit aux femmes de s’assembler. Cette grande question sociale se trouva ainsi étranglée par hasard.

Que devint Rose Lacombe ? Chose étrange ! cette femme violente eut, comme la plupart des terroristes du temps, un jour de faiblesse et d’humanité qui faillit la perdre. Elle se compromit fort en essayant de sauver un suspect. C’est le moment tragique de mars 94. Elle demanda un passeport, comme actrice, engagée au théâtre de Dunkerque.

En juin 94, nous la retrouvons assise à la porte des prisons, vendant aux détenus du vin, du sucre, du pain d’épice, etc., etc., position lucrative, qui, par la connivence des geôliers, permettait de vendre à tout prix. On n’eût pu reconnaître la fougueuse bacchante de 93. Elle était devenue une marchande intéressée ; du reste, douce et polie.