Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/32

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Je n’ai voulu nulle autre société, pendant longues années, que cet auditoire sympathique, et ce qui surprendra peut-être, c’est que je m’y réfugiai dans les moments les plus graves où tout homme cherche un ami ; c’est là que j’allai m’asseoir dans mes plus funèbres jours.

Grande et rare confiance ! mais qui n’était pas un instinct aveugle. Elle était fondée en raison. J’avais droit de croire qu’il n’y avait pas un seul homme de sens parmi ceux qui m’écoutaient, qui me fût hostile. Ami du passé, ami du présent, je sentais en moi les deux principes, nullement opposés, qui se partagent le monde ; je les vivifiais l’un par l’autre. Né de la Révolution, de la liberté, qui est ma foi, je n’en ai pas moins eu un cœur immense pour le moyen âge, une infinie tendresse ; les choses les plus filiales qu’on ait dites sur notre vieille mère l’Église, c’est moi peut-être qui les ai dites…. Qu’on les compare à la sécheresse de ses brillants défenseurs…… Où puisais-je ces eaux vives ? Aux sources communes où puisa le moyen-âge, où la vie moderne s’abreuve, aux sources du libre esprit.

Un mot résume ma pensée sur le rapport des deux principes : « L’histoire (c’est ma définition de 1830, et j’y tiens), est la victoire progressive de la liberté.