Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/76

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vérités d’un ordre supérieur, et qui est supposée toujours inspirée par des pouvoirs surnaturels. Ainsi, ne pouvant être réunis, groupés autour d’une même parole, on n’a jamais pu les faire mouvoir dans un sens quelconque, leur faire entreprendre des guerres, des expéditions, dans le but de réaliser quelque projet vaste et mystérieux. C’est une des raisons qui firent des Slaves un peuple ni guerrier ni conquérant. Toutes les grandes expéditions des Barbares n’ont été inspirées, n’ont pu être réalisées que par des idées d’un ordre élevé, par des idées religieuses. Je sais que les chroniqueurs du moyen âge et les savants modernes expliquent ce fait d’une manière différente. Ceux du moyen âge ne voient dans les rois goths et ostrogots, et même dans Attila et Gen-Gis-Kan, que des chevaliers errants épris d’aventures hasardeuses et de périls romanesques.

Les philosophes modernes expliquent les expéditions des chefs ouraliens par des vues tout individuelles d’ambition et de conquête. Ils attribuent à la faim et à la misère les immenses mouvements des Barbares. Mais il suffit de consulter les monuments de la poésie des Barbares pour voir que ces expéditions étaient toujours entreprises au nom de quelque prophétie ou révélation, qui indiquait aux peuples des terres lointaines à soumettre, de nouveaux royaumes à conquérir. Gen-Gis-Khan, que nous citerons souvent, car il résume pour nous l’histoire de tous les chefs ouraliens, Gen-Gis-Khan lui-même, avant d’entreprendre la dévastation d’une partie du globe, se retire sur le sommet des montagnes et y reste plu-