Page:Millanvoye — Anthologie des poètes de Montmartre, éd7.djvu/248

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SONNET

Rêver, presque dormir. Dormir des paysages,
Peindre avec du sommeil de très sourds horizons
Où n’ont surgi jamais ni souliers, ni maisons,
Mais seulement parfois d’impalpables visages.

Peindre rien, presque rien, en tons subtils et doux.
Ne se frôler les yeux qu’avec des robes d’âmes,
Ne pas troubler de bruit ces visions de femmes
Qui rôdent longuement dans l’intime de nous.

Chanter, chanter très bas la chanson irréelle.
Souffler le dessin net et la touche cruelle,
Copier le non-être avec soin et très bien.
 
Au bas d’un brouillard flou mettre sa patarafle.
Par impuissance, hélas !... n’être rien, presque rien,
N’être rien !... mais surtout n’être pas photographe !