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ÉLÉGIES.

Couvre, hélas ! ce triste chemin ;
Cache au désespoir de ma mère
La place où je serai demain.
Mais si mon amante voilée
Au détour de la sombre allée
Venait pleurer quand le jour fuit,
Éveille par un léger bruit
Mon ombre un instant consolée. »
Il dit, s’éloigne… et, sans retour,
La dernière feuille qui tombe
A signalé son dernier jour.
Sous le chêne on creusa sa tombe…
Mais son amante ne vint pas
Visiter la pierre isolée ;
Et le pâtre de la vallée
Troubla seul du bruit de ses pas
Le silence du mausolée.

Quoique plusieurs personnes aient paru préférer cette version, je me suis reproché, en l’examinant, de n’avoir amené qu’un simple pâtre au tombeau de l’infortuné jeune homme, qui, près de sa dernière heure, songeait d’avance au deuil de sa mère. J’ai cru devoir restituer au sujet une circonstance trop naturelle pour qu’il fût permis de la supprimer.




L’ANNIVERSAIRE.


Hélas ! après dix ans je revois la journée
Où l’ame de mon père aux cieux est retournée.
L’heure sonne : j’écoute… O regrets ! ô douleurs !
Quand cette heure eût sonné, je n’avais plus de père :
On retenait mes pas loin du lit funéraire ;
On me disait : « Il dort ; » et je versais des pleurs.

Mais du temple voisin quand la cloche sacrée
Annonça qu’un mortel avait quitté le jour,
Chaque son retentit dans mon ame navrée,