Page:Millevoye - Œuvres complètes de Millevoye, I, 1837, éd. Pongerville.djvu/67

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Désormais muette et voilée,
Dort, et ne redit plus le doux chant des amours.
Sous ces rideaux légers, les songes, autour d’elle
Balançant leur vol incertain,
Des souvenirs du soir charmaient, jusqu’au matin,
Le paisible sommeil qui la rendait plus belle.
Sur ce divan étoile d’or,
Qu’inventa l’opulente Asie,
De ses cheveux je crois encor
Respirer la pure ambroisie.
Je revois le flambeau qui près d’elle veillait
A l’instant où sa main chérie
Traça dans un dernier billet
Ces mots : « C’est pour toute la vie… »
Mots charmants ! Oh ! déjà seriez-vous effacés ?
Ne resterait-il plus à mon âme flétrie
Qu’un regret douloureux de mes plaisirs passés ?




LA PROMESSE.


Il est donc vrai ! tu veux qu’en mon lointain voyage
Sous le ciel d’Orient j’emporte ton image ;
Et d’un espoir douteux abusant mon amour,
Ta bouche me promet les baisers du retour.
Du retour !… Tu l’as vu, cet éclatant navire !
Et sa poupe et ses mâts de fleurs étaient ornés ;
En ses pavillons d’or il tenait enchaînés
Et la fortune et le zéphyre.
Avant peu, disait-on, il reverra le port.
Eh bien ! les jours ont fui. L’inquiète espérance
A l’horizon des mers cherche en vain sa présence,
Il ne reviendra plus. Si tel était mon sort !
Hélas ! du voyageur la vie est incertaine !
S’il échappe aux brigands de la forêt lointaine,