Page:Milosz - Poèmes, 1929.djvu/60

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Descend sur la poussière du grenier : et autour de nous le silence
Des rouets arrêtés de l’araignée fileuse. — Cœur !

Triste cœur ! le berger vêtu de bure
Souffle dans le long cor d’écorce. Dans le verger
Le doux pivert cloue le cercueil de son amour
Et la grenouille prie dans les roseaux muets. Ô triste cœur !

Tendre églantier malade au pied de la colline, te reverrai-je
Quelque jour ? et sais-tu que ta fleur où riait la rosée
Était le cœur si lourd de larmes de mon enfance ? ô ami !
D’autres épines que les tiennes m’ont blessé !

Et toi, sage fontaine au regard si calme et si beau,
Où se réfugiait, par les chaleurs sonnantes
Tout ce qui restait d’ombre et de silence sur la terre !
Une eau moins pure coule aujourd’hui sur mon visage.

Mais le soir, de mon lit d’enfant qui sent les fleurs, je vois
La lune follement parée des fins d’été. Elle regarde
À travers la vigne amère, et dans la nuit de senteurs
La meute de la Mélancolie aboie en rêve !

Puis, l’Automne venait avec ses bruits d’essieux, de haches et de puits. Comme la fuite
Du lièvre au ventre blanc sur la première neige, le jour rapide


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