Page:Milosz - Poèmes, 1929.djvu/91

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Et quand la femme et la mort crieront : non !
Frère, nous saluerons l’espace ivre de vie
Et le mot appris des Héros,
Le Oui universel montera à nos lèvres.

Quarante ans.
Pour apprendre à parler sans mépris de la femme. Ô Amour !
Quarante ans je vous ai cherché parmi les femmes
Mais ce n’est point parmi les femmes que je vous ai trouvé.
Ô Femme ! La pitié des pierres me saisit !
Mère ! Mère ! tu ne sais plus, tu ne sais pas encore qui tu es.
Toi, blanche renversée dans les fleurs ! si longtemps
Tu as dormi au plus obscur, au plus muet du beau jardin abandonné !
Et te voici debout dans ce temps de laideur rieuse,
Au milieu de ces fils qui ont perdu leur dieu et n’ont pas trouvé la nature.
Ô Mère ! Mère ! et cette belle épaule tombante de porteuse d’eau fraîche,
Et cet air rentré de servante réveillée avant l’heure.
Quelle sagesse et quelle connaissance, ô femme, dans la paume de tes mains !
Que je ne les puisse contempler sans qu’une colombe s’en échappe !
Et ta sainte blancheur apprivoise le cygne !
Lorsque l’époux mourra, tu suivras, tu mourras :
Non pas de la tristesse de la chair, mais de la joie
Profonde de l’esprit !
Pour te parler et être compris, ô Mère, il faut redevenir enfant.
Car que peux-tu comprendre à ce monde du Mouvement,