Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/23

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prendre avec nous, car il avait fini par persuader les femmes de consentir à son départ. Nous hésitions ; mais il fit tant d’instances que nous mimes nos scrupules de côté et que nous lui comptâmes la somme offerte. L’homme fit alors au chien ses adieux comme à un de ses amis les plus chers, et nous supplia, à plusieurs reprises, d’être bons pour ce petit être. Nous nous y engageâmes du fond du cœur et nous n’avons pas besoin d’assurer que nous avons fidèlement tenu notre parole.

Une quinzaine plus tard, ces braves gens furent, ainsi que presque tous les blancs de ce côté du Minnesota, horriblement assassinés par une invasion de Sioux[1]. Ce terrible massacre, accompagné de toutes les brutalités qui caractérisent les guerres des sauvages, avait son explication, sinon son excuse ou même sa justification, dans les mauvais traitements qu’avaient reçus les Indiens. La négligence et l’injustice du gouvernement américain, les atrocités commises par les troupes qu’il envoie garder la frontière, avaient exaspéré et jeté hors d’elles-mêmes les tribus indigènes. Plusieurs milliers d’Indiens, hommes, femmes et enfants, à des époques fixées par le gouvernement lui-même, s’étaient périodiquement réunis aux forts Snelling et Abercrombie[2] pour recevoir le subside annuel, promis en payement des terres qu’ils avaient cédées aux États-Unis. Soit négligence des fonctionnaires à Washington, soit incurie ou malversation de la part de leur agents, le fait est que, depuis quelques années, on faisait attendre les Indiens durant plusieurs semaines en leur promettant l’argent qui leur était dû. Quoiqu’ils ne soient en mesure d’apporter avec eux que peu de provisions, suffisantes à peine pour quelques jours, et bien qu’ils soient ainsi éloignés des troupeaux de bisons qui constituent leur unique ressource,

  1. Le tenitoire des Sioux ou Dacotas est au nord de celui des Ponkas, à l’ouest du Missouri. On trouve des Sioux aussi le long de la Saskatchaouane du sud. (Trad.)
  2. Ces forts ne sont pas marqués sur nos cartes. Le second, comme on va le voir, est situé sur la Rivière Rouge du nord, en amont de Georgetown. (Trad.)