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DE L’ATLANTlQUB


venions d’avoir sous les yeux nous avait retracé son histoire avec une exactitude incontestable : la faiblesse croissante, la disette sans remède, l’effort pour soutenir la vie qui s’éteignait en suçant des morceaux d’os, enfin la mort par la faim. Nous aussi, nous touchions déjà à cette extrémité d’_tI’6 obligés à tuer un de n08 chevaux. Lors de son départ, cet Indien avait eu sur nous un avantage : celui d’ètre dans son propre paYSi nous, nous étions des voyageurs sur une terre étrangère. Nous arrivions au dernier acte du drame. Le dénouement en serait-ille m_me’

Chacun de nous ne vit l’avenir que SOU8 son plus terrible aspect, lors de notre conférence ce soir-là, et il fut à l’unanimité convenu qu’on tuerait le PelÏl Noir au point du jour. Nous limes notre roubébou avec la martre et des baies d’airelle ; mais ce souper avait une odeur si puante, si nauséabonde, qu’il était désagréable m_me à des appétits comme les nôtres, et que ce pauvre M. O’B. n’eut pas la satisfaction de garder ce qui lui avait coOté tant d’efforts à avaler.

De bonne heure, le 9 aoOt, le Petü Noir fut conduit au lieu d’exécution ; mais, bien que tous nous fussions d’accord sur la nécessité de sa mort, nous avions tous des remords sur le sacrifice d’un animal qui nous avait accompagnés à travers tant de fatigues. Cependant L’Assiniboine finit par saisir son fusil et par envoyer à la pauvre béte, derrière l’oreille, une balle qui rabattit. Quelques minutes après, des tranches de chair grillaieDt sur le feu, et chacun était occupé à tailler de minces bandes de viande pour les conserver. Toute la journée, nous nous gorgeâmes de ce que nous ne pouvions pas emporter, tandis que le reste se séchait sur un large feu. D’abord et d’avance, on avait, il e8t vrai, douté qu’on pOt manger de ce cheval : Milton avait mème trouvé que cette chair sentait l’écurie ; mais, au fait, chacun s’en reput avec àppétit. Les instants que nous n’employions pas à dévorer, nous les utilisions pour raccommoder nos hail