Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/37

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sâmes pas nous reposer un seul instant de nos fatigues, ni cesser de surveiller notre course ou d’éviter les saillies et les rochers.

Jamais aucun de nous n’oubliera les souffrances de cette nuit, ni l’immense sentiment de consolation que nous fit éprouver, je ne dirai pas la première apparition du jour, mais la première diminution des ténèbres, Peu après, la tempête s’apaisa sensiblement ; mais la pluie continuait à tomber à flots, lorsque nous nous hâtâmes de profiter de l’aube pour débarquer sur une rive fangeuse, la première place praticable que nous eussions découverte, Après avoir tiré à terre aussi haut que possible nos canots, pour que le courant qui montait ne pût pas les enlever, nous nous enveloppâmes dans nos couvertures toutes dégouttantes d’eau, et, dans l’épuisement où nous jetait la fatigue, nous nous endormîmes d’un long et profond sommeil[1].

À notre réveil, le soleil déjà haut brillait dans le ciel, où il n’y avait plus un nuage, et nos couvertures étaient déjà séchées. Nous nous levâmes donc ; nous étendîmes nos effets sur les buissons et nous essayâmes d’allumer du feu. Comme nos allumettes et notre amadou étaient mouillés, nous perdîmes beaucoup de temps à tâcher d’obtenir du feu en essayant d’enflammer des morceaux de linge sec par un coup de fusil. Au milieu de ces tentatives parut un autre aventurier. Il descendait la rivière dans un dug-out, espèce de petit canot creusé dans un tronc d’arbre. Nous le hélâmes à son passage. Il aborda et nous fournit quelques allumettes sèches. Ayant

  1. M. Ross, l’auteur des Chasseurs de fourrure dans l’Occident, décrit dans son Histoire de l’Établissement de la Rivière Rouge, une tempête fort semblable à celle dont on vient de lire le récit. Dans cette occasion, l’on campait au milieu des plaines. Le tonnerre abattit trois tentes et tua deux hommes, une femme et deux enfants. Plusieurs chevaux et plusieurs chiens y périrent aussi. La pluie était si furieuse, qu’en quelques minutes, elle forma un torrent où deux petits enfants manquèrent de se noyer. Il y a peu d’étés, dans la vallée de la Rivière Rouge, où le tonnerre ne tue pas plusieurs personnes. (trad.)