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de la colonie, et Milton, un de ses vieux favoris. Le cheval de La Ronde avait maintes fois été vainqueur sur le turf ; mais celui de Cheadle était peut-être le plus extraordinaire de toute la cavalcade. Il s’appelait Bucéphale. Sa hauteur était presque de cinq mains, la main valant 0m,1016. Il avait les épaules droites ; une de ses jambes, informe et courbée ; la tête très large, et la queue fort longue. En route, il choppait toujours. Quand Cheadle commença à s’en servir pour parcourir la colonie, il était par lui lancé sur presque toutes les portes et les clôtures. Dès que le cheval en apercevait une, il courait vers elle, puis s’arrêtait soudain, immobile comme un roc, invitant sans doute son cavalier à descendre et à l’attacher. C’était une preuve irréfutable des habitudes de bavardage qui avaient distingué son martre précédent. Néanmoins Bucéphale se montra le plus utile peut-être de nos chevaux. Sans faire une faute, sans jeter une seule fois son cavalier à terre, il poursuivait le bison sur le terrain le plus inégal ; bref il finit par réussir à porter nos bagages par-dessus les montagnes jusque dans la Colombie Britannique.

Nos provisions consistaient en pemmican, en viande séchée, farine, thé, sel, tabac, rhum et en une bonne quantité de munitions ; nous avions des couvertures et des robes de bison, enfin des couteaux et des colifichets pour faire ou des échanges ou des cadeaux. Tous ces effets, plus une tente de toile, remplissaient six des charrettes petites et grossières dont on se sert ici. Elles sont tout en bois. Sans doute elles se brisent plus aisément que si le fer y était employé ; mais aussi elles peuvent être raccommodées même quand on se trouve dans un endroit où il n’y a ni fer ni forgeron.

En échange de nos bottes et de nos habits, nous nous procurâmes le costume du pays, c’est-à-dire des moccasins et des chemises de chasse faites en peau de daim ou de caribou. Quant aux armes, chacun de nous portait un fusil à deux coups, un