Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/73

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lui offrir, ainsi qu’à ses compagnons, ce que nous regardions comme un très-beau cadeau de couteaux, de munitions, de thé, de sel et de tabac. Pourtant ils n’avaient pas l’air satisfait et ils demandaient encore un fusil, des couvertures et principalement du rhum. Nous les leur refusâmes. Sur ce, ils s’éloignèrent paraissant de bonne humeur ; mais, en insinuant qu’ils doutaient après tout que nous fussions de si grands personnages, puisque nous n’avions pas de rhum. En partant, ils laissèrent voir l’admiration que leur inspiraient nos chevaux. La Ronde en devint fort inquiet. Il nous assura qu’ils étaient mécontents de la façon dont nous les avions reçus et que certainement ils suivraient notre piste dans l’intention de nous enlever nos chevaux. En conséquence, nous prîmes nos mesures pour détourner leur poursuite et pour conserver notre propriété. Nous fîmes en avant trois ou quatre milles pour aller camper près de la rivière, comme si nous nous proposions de la traverser. La nuit, nous nous gardâmes avec soin. Elle s’écoula sans alarme. Le lendemain matin, nous tournions à angle droit, faisant une marche forcée d’environ vingt milles, qui nous conduisit à un petit cours d’eau appelé la rivière de l’Aigle[1], où nous campâmes. Le temps favorisait notre fuite. Un épais brouillard nous dérobait à la vue de quiconque aurait surveillé nos mouvements. Dans la soirée, s’éleva un vent violent qui dispersa, il est vrai, la brume, mais releva le gazon qu’avait abaissé notre passage. Ainsi nos traces furent effacées. À la nuit, nous reprîmes notre faction vigilante, après avoir attaché à des piquets autour de la loge ceux de nos chevaux qui avaient le plus de valeur.

Le lendemain se passa en quête des femelles de bisons ; mais nous n’en vîmes aucune. Nous résolûmes donc de rester quelques jours encore à chasser les mâles avant de rentrer dans le

  1. Petit affluent de droite de la Saskatchaouane du nord. (Trad.)