Page:Mirabeau l'aîné - Erotika Biblion, 1867.djvu/38

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
16
EROTIKA BIBLION

Ces êtres si surprenants, surtout pour les hommes, jouissaient ainsi d’une paix éternelle et d’un bien-être inaltérable. Les arts, qui tendent au bonheur et à la conservation de l’espèce, étaient aussi perfectionnés qu’il soit possible de l’imaginer et même de le désirer ; et l’on n’y avait pas la moindre idée de ces arts destructeurs enfantés par la guerre. Ainsi les habitants de l’anneau n’avaient point passé par ces alternatives de raison et de démence qui ont si prodigieusement mêlé nos sociétés de bien et de mal. Les grands talents dans la science funeste de faire celui-ci, loin d’être admirés chez eux, n’y étaient pas même connus. Les plaisirs stériles et factices n’y régnaient pas plus que le faux honneur, et l’instinct de ces êtres fortunés leur avait appris sans effort ce que la triste expérience de tant de siècles nous enseigne encore vainement ; je veux dire, que la véritable gloire d’un être intelligent est la science, et la paix, son vrai bonheur.

Voilà ce qu’une lecture rapide m’a permis de retenir du voyage de Shackerley, qu’Habacuc, à la fin de son voyage, reprit par les cheveux, et déposa en Arabie, d’où il l’avait enlevé. Quand le développement et la traduction de ce précieux manuscrit seront achevés, je me propose d’en donner à l’Europe savante une édition non moins authentique que celle des livres sacrés des Brahmes, que M. Anquetil a incontestablement rapportés des bords du Gange ; car j’ose me flatter de savoir presque aussi bien le mozarabique qu’il sait le zend ou le pelhvi.