Page:Mirbeau - Consultation, paru dans l’Écho de Paris, 10 novembre 1890.djvu/6

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Le Docteur (rêveur)

Oui ! oui ! certainement…

Le Client

Je ne veux pas trop penser à moi en cette circonstance… Pourtant, je suis député, très en vue… je représente toutes les bonnes causes… Un éclat, ce serait terrible pour moi… cela me nuirait énormément dans ma vie publique !… Et puis, ma pauvre amie, elle ne vit plus !… Si vous saviez comme, depuis quatre mois, elle s’affole ! D’abord elle a voulu se tuer… J’ai pu l’en empêcher, heureusement… Ensuite elle s’est remise à monter à cheval, à suivre des chasses, à faire des exercices violents, à porter des corsets comme ça… Une série d’imprudences qui n’ont rien amené de bon… Nous avons songé à une sage-femme !… Mais ces opérations-là sont tellement délicates !… Je n’ai pas confiance dans les sages-femmes… Souvent elles sont si ignorantes !… Et puis ! et puis !… vraiment on hésite à confier à ces créatures-là un secret de cette importance. Avec elles, il n’y a pas assez de sécurité ! Si, plus tard — est-ce qu’on sait ?… — non, non !… On n’entend plus parler que de chantage, maintenant !… Nous sommes dans une bien sale époque, mon ami… Vous ne dites rien ?

Le Docteur

Si… si… je réfléchis… C’est très intéressant ce que vous me dites là ?… Alors ?