Page:Mirbeau - L’Épidémie.djvu/22

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LE MAIRE, d’une voix qui domine le bruit.

L’épidémie est sur l’arsenal et, principalement, sur la caserne de l’artillerie de marine.

LE MEMBRE DE LA MAJORITÉ

Très bien ! Très bien !

LE MEMBRE DE L’OPPOSITION, furieux.

Il fallait le dire tout de suite et nous épargner d’inutiles angoisses !… Certes nous ne craignons pas les épidémies… Nous leur avons toujours opposé un viril dédain… toujours nous les avons traitées par le mépris !… Mais nous avons de la famille… Nous avons des amis… que diable ! Et l’arsenal n’est pas la ville… la caserne n’est pas la ville… Et puis, il y a tous les ans des épidémies sur la caserne… Nous n’y pouvons rien… Cela ne nous regarde pas.

TOUS

Mais non… Mais non !

LE DOCTEUR TRICEPS

Du calme, messieurs… Ne nous emportons pas… Procédons avec méthode… (Au maire.) Combien de décès ?

LE MAIRE

Hier, douze soldats sont morts… ce matin, seize.

LE DOCTEUR TRICEPS, approuvant.

Ah !… Combien de malades ?

LE MAIRE

À l’heure actuelle, on compte cent trente-cinq malades.

LE DOCTEUR TRICEPS, même jeu.

Ah !… (Il prend des notes.) C’est normal !…