Page:Mirbeau - Le Jardin des supplices.djvu/195

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tomes panachés, des cypérus, pareils à des chevelures, des luzules géantes, mêlent leurs feuillages disparates aux inflorescences phalliformes et vulvoïdes des plus stupéfiantes aroïdées. Par une combinaison géniale, sur les bords du bassin, entre les scolopendres godronnés, les trolles et les inules, des glycines artistement taillées s’élèvent et se penchent, en voûte, au-dessus de l’eau qui reflète le bleu de leurs grappes retombantes et balancées. Et des grues, en manteau gris perle, aux aigrettes soyeuses, aux caroncules écarlates, des hérons blancs, des cigognes blanches à nuque bleue de la Mandchourie, promènent parmi l’herbe haute leur grâce indolente et leur majesté sacerdotale.

Ici et là, sur des éminences de terre et de rocs rouges tapissés de fougères naines, d’androsaces, de saxifrages et d’arbustes rampants, de sveltes et gracieux kiosques lancent, au-dessus des bambous et des cedrèles, le cône pointu de leurs toits ramagés d’or et les délicates nervures de leurs charpentes dont les extrémités s’incurvent et se retroussent dans un mouvement hardi. Le long des pentes, les espèces pullulent ; épimèdes