Page:Mirbeau - Le Jardin des supplices.djvu/224

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— C’est lui, sans doute, que nous avons rencontré sur une civière, tout à l’heure ?

— Ah ! vous l’avez rencontré ?… cria le bonhomme flatté… Eh bien, qu’en dites-vous ?…

— Quelle horreur !… fit Clara d’une voix tranquille, qui démentait le dégoût de son exclamation.

Alors le bourreau expliqua :

— C’était un misérable coolie du port… rien du tout, milady… Certes, il ne méritait pas l’honneur d’un si beau travail… Il avait, paraît-il, volé un sac de riz à des Anglais… nos chers et bons amis les Anglais… Quand je lui eus enlevé la peau et qu’elle ne tenait plus à ses épaules que par deux petites boutonnières… je l’obligeai à marcher, milady… Ha !… ha !… ha !… La bonne idée, vraiment !… C’était à se tordre les côtes… On eût dit qu’il avait sur le corps, comment appelez-vous cette chose ?… Ah ! oui ma foi !… un mac-farlane ?… Jamais il n’avait été si bien vêtu, le chien, ni par un plus parfait tailleur… Mais il avait les os si durs que j’y ai ébréché ma scie… cette belle scie que voilà.

Un petit morceau blanchâtre et graisseux