Page:Mirbeau - Le Jardin des supplices.djvu/243

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telle chose, ma chère Clara ?… Mais c’est un monstre !… Il est même effrayant de penser qu’il existe, quelque part, parmi des hommes, un tel monstre !… Je sens que, dorénavant, j’aurai toujours le cauchemar de cette face horrible… et l’effroi de ces paroles… Vous me faites beaucoup de peine, je vous assure…

Clara répliqua vivement :

— Et toi aussi, tu me fais de la peine… Pourquoi prétends-tu que le gros patapouf est un monstre ?… Tu n’en sais rien !… Il aime son art, voilà tout !… Comme le sculpteur aime la sculpture, et le musicien la musique… Et il en parle merveilleusement !… Est-ce curieux et agaçant que tu ne veuilles pas te mettre dans l’esprit que nous sommes en Chine et non, Dieu merci, à Hyde-Park ou à la Bodinière, au milieu de tous les sales bourgeois que tu adores ?… Pour toi, les mœurs devraient être les mêmes dans tous les pays… Et quelles mœurs !… Belle conception !… Tu ne sens donc pas que ce serait à mourir de monotonie, à ne jamais plus voyager, mon cher !…

Et, tout d’un coup, d’un ton de reproche plus accentué :