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I


Il y a douze ans, ne sachant plus que faire et condamné par une série de malchances à la dure nécessité de me pendre ou de m’aller jeter dans la Seine, je me présentai aux élections législatives, — suprême ressource — en un département où, d’ailleurs, je ne connaissais personne et n’avais jamais mis les pieds.

Il est vrai que ma candidature était officieusement soutenue par le cabinet qui, ne sachant non plus que faire de moi, trouvait ainsi un ingénieux et délicat moyen de se débarrasser, une fois pour toutes, de mes quotidiennes, de mes harcelantes sollicitations.

À cette occasion, j’eus avec le ministre, qui était mon ami et mon ancien camarade