Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/145

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derrières crottés que tu trousses dans la campagne !…

J’entendais le parquet crier sous les pas de Monsieur qui marchait, dans le salon, avec une animation fébrile.

— Moi ?… Ah ! par exemple !… En voilà des idées !… Où vas-tu chercher tout cela, mignonne ?…

Madame s’obstinait :

— Et la petite Jézureau ?… Quinze ans, misérable !… Et pour laquelle il a fallu que je paie cinq cents francs !… Sans quoi, aujourd’hui, tu serais peut-être en prison, comme ton voleur de père…

Monsieur ne marchait plus… Il s’était effondré dans un fauteuil… Il se taisait…

La discussion finit sur ces mots de Madame :

— Et puis, ça m’est égal !… Je ne suis pas jalouse… Tu peux bien coucher avec cette Célestine… Ce que je ne veux pas, c’est que cela me coûte de l’argent…

Ah ! non !… Je les retiens, tous les deux…


Je ne sais pas si, comme le prétend Madame, Monsieur trousse les petites filles dans la campagne… Quand cela serait, il n’aurait pas tort, si tel est son plaisir… C’est un fort homme, et qui mange beaucoup… Il lui en faut… Et Madame ne lui en donne jamais… Du moins, depuis que je suis ici, Monsieur peut se fouiller… Ça, j’en