Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/300

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vette empesée, dont était bardée sa poitrine plate d’inféconde femelle. M. le Doyen était anxieux… Il demanda d’une voix saccadée :

— Vite… ma sœur… parlez… Vous m’effrayez… Qu’est-ce qu’il y a ?

Alors, très brève, sœur Angèle dit :

— Il y a que, tout à l’heure, passant dans la venelle… j’ai vu, sur votre église… un homme tout nu !…

M. le Doyen ouvrit, en grimace, sa bouche qui demeura béante et toute convulsée… Puis, il bégaya :

— Un homme tout nu ?… Vous avez, ma sœur, vu… sur mon église… un homme… tout nu ?… Sur mon église ?… Vous êtes sûre ?…

— Je l’ai vu…

— Il s’est trouvé, dans ma paroisse, un paroissien assez éhonté… assez charnel… pour se promener, tout nu, sur mon église ?… Mais, c’est incroyable !… Ah ! ah ! ah !…

Son visage s’empourprait de colère ; sa gorge contractée râpait les mots.

— Tout nu, sur mon église ?… Oh !… Mais, dans quel siècle vivons-nous ?… Et que faisait-il, tout nu, sur mon église ?… Il forniquait, peut-être ?… Il…

— Vous ne me comprenez pas… interrompit sœur Angèle… Je n’ai pas dit que cet homme tout nu fût un paroissien… puisqu’il est en pierre…