Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/493

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— Edgar, tu comprends, je ne puis le manquer… Et justement, peut-être aurait-il une place pour toi ?… Une place indiquée par Edgar… ah ! ce serait épatant.

En me quittant, il me dit :

— Je viendrai te voir demain. Sois sage… ne fais plus de bêtises… Ça ne mène à rien… Et pénètre-toi bien de cette vérité, que la vie, Célestine… c’est la vie…

Le lendemain, je l’attendis vainement… Il ne vint pas…

— C’est la vie… me dis-je…

Mais le jour suivant, comme j’étais impatiente de le voir, j’allai à la maison. Je ne trouvai dans la cuisine qu’une grande fille blonde, effrontée et jolie… plus jolie que moi…

— Eugénie n’est pas là ?… demandai-je.

— Non, elle n’est pas là… répondit sèchement la grande fille.

— Et William ?…

— William non plus…

— Où est-il ?

— Est-ce que je sais, moi ?

— Je veux le voir… Allez le prévenir que je veux le voir…

La grande fille me regarda d’un air dédaigneux :

— Dites-donc ?… Est-ce que je suis votre domestique ?

Je compris tout… Et comme j’étais lasse de lutter, je m’éloignai.