Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/80

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tas de nièces et de cousines… des fainéants, des sans le sou, des traîne-misère… et qui le grugeaient… et qui le volaient… fallait voir ça !… C’était une abomination… Aussi, vous pensez si j’y ai mis bon ordre… si j’ai nettoyé la maison de toute cette vermine… Mais, ma chère demoiselle, sans moi, le capitaine serait sur la paille, aujourd’hui… Ah ! le pauvre homme !… Il est bien content de ça, allez, maintenant…

J’insiste avec une intention ironique que, d’ailleurs, elle ne comprend pas :

— Et, sans doute, mademoiselle Rose, qu’il vous mettra sur son testament ?…

Prudemment, elle réplique :

— Monsieur fera ce qu’il voudra… il est libre… Bien sûr que ce n’est pas moi qui l’influence… Je ne lui demande rien… je ne lui demande même pas de me payer des gages… Aussi, je suis chez lui par dévouement… Mais il connaît la vie… il sait ceux qui l’aiment, qui le soignent avec désintéressement, qui le dorlotent… Il ne faudrait pas croire qu’il est aussi bête que certaines personnes le prétendent, Mme  Lanlaire en tête… qui en dit des choses sur nous !… C’est un malin au contraire, mademoiselle Célestine… et qui a une volonté à lui… Pour ça !…

Sur cette éloquente apologie du capitaine, nous arrivons à l’église.

La grosse Rose ne me quitte pas… Elle m’oblige à prendre une chaise près de la sienne, et se met