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De là, les Quatre Évangiles.

Et dans cette nouvelle série, la première œuvre, Fécondité, oppose les réalités où nous sommes, aux réalités idéales vers quoi nous aspirons, le présent douloureux à l’avenir heureux, la médiocrité d’aujourd’hui à la Beauté de demain.

C’est plus qu’un roman, autre chose qu’un poème : c’est un livre de prophète, de voyant, mais qui sait voir singulièrement juste et singulièrement grand, quand il regarde les ténèbres de la terre, ou qu’il interroge les splendeurs du rêve futur…

Est-il besoin de rappeler aux lecteurs de l’Aurore le sujet de ce livre ? Jamais, je crois, un feuilleton ne fut tant en harmonie avec le corps d’un journal. Alors que le plus passionnément, de plus en plus victorieusement, il n’était question que de vérité et de justice, alors que la tragédie, plus aiguë, plus pathétique, plus énorme, touchait à l’épopée, Fécondité déroulait ses fresques et ses miniatures, ses réalités et ses rêves, ses luttes et ses conquêtes. Au jour le jour, pêle-mêle, avec les nouveaux efforts des justes, avec les derniers crimes des partisans de l’iniquité, en un chaos de mensonges et d’héroïsmes, de désintéressements nobles et de sauvageries mercenaires, de machinations, de veuleries, de vertus et de lâchetés, les personnages d’Émile Zola vivaient, créaient, mouraient chacun selon son mérite individuel et sa norme sociale, et ils animaient démesurément, de leur