Page:Mirbeau - Les Écrivains (première série).djvu/48

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il y a une quantité d’autres petits services intimes et secrets qu’on n’aime point demander à son valet de chambre et dont Maginard se console et se contente. On raconte qu’un jour le ministre avait chargé Maginard d’une mission spéciale, à laquelle la politique était tout à fait étrangère. Cela avait nécessité quelques déboursés, et, dame, Maginard n’est pas riche encore. Il s’en vint un matin trouver le ministre et, avec mille précautions lui remit la note de ses frais.

— Qu’est-ce que cela ? s’écria le ministre d’une voix légèrement colère.

— Monsieur le ministre, répondit tristement Maginard, ce sont les frais, vous savez bien, pour cette affaire…

— Hé, monsieur, interrompit le ministre, en jetant la note au panier, il fallait me dire que vous ne pouviez pas me rendre ce service… un service d’homme à homme… J’aurais pris un commissionnaire — c’eût été moins cher.

Deux mois après, Maginard a été décoré, et, l’autre jour on a pu voir dans le Journal officiel, en regard de son nom, la traditionnelle mention : Titres exceptionnels.

Il y a quatre ans, après vingt-deux années de durs services dans les chasseurs d’Afrique, on réforma le vieux brigadier B… Son corps n’était que blessure. Toujours le premier aux moments