Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/123

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et substantiels : sandwiches, gâteaux au gingembre, porto, thé, etc… Je connus ainsi toutes leurs joies.

— Quel joli appartement vous avez !… me disait la marquise le soir, au restaurant, au théâtre, car – en dépit de M. de Mun, de M. de Mackau et du Bazar de la Charité, nous ne nous quittions plus… Quel goût charmant !… Il est fait pour l’amour !

— Vraiment ?… Vous trouvez ?… Vous êtes bien aimable…

— Mais par exemple, votre cabinet de toilette…

— Il ne vous plaît pas !

— Ce n’est pas cela !… Voyons… vous n’avez pas un peu honte, avec ces peintures licencieuses ?…

— Et vous ?…

— C’est comme vos livres… Quelle horreur !…

— Vous les lisez donc ?… — Enfin, vous avez un goût charmant !…

C’est ainsi que nous passions nos soirées à dire des choses graves et profondes.

Cela dura trois mois. Un jour, Lucien, pâle, défait, les larmes aux yeux, vint m’apprendre que tout était rompu, fini. Elle le trompait… Scène atroce, violente, horrible !… Au cours d’une explication, il avait dû casser trois de mes glaces et une quantité de menus bibelots très chers… Puis, il me remit la clé de mon appartement et s’en alla.