Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/246

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

« C’est bon… c’est bon… allez toujours… J’avons un député qui fera cesser, bientôt, tous ces micmacs. Il l’a promis ! »

C’est ainsi qu’il était arrivé, jadis, au marquis de Portpierre, une aventure électorale bien amusante.

Dans sa circonscription se trouvait un canton très éloigné du château, où son influence personnelle était moins directe, et, si j’ose dire, moins quotidienne. Il faut même l’avouer, une forte opposition s’était formée contre lui, qui ne menaçait en rien sa situation politique, mais qui l’ennuyait tout de même… Cette opposition, il l’avait vaincue en promettant solennellement d’obtenir de l’administration qu’on construirait, au chef-lieu, qui la réclamait en vain, depuis longtemps, une halte de chemin de fer. Les années passèrent, les législatures aussi, et la halte promise ne se faisait point… ce qui n’empêchait pas le marquis d’être toujours réélu.

Une fois, voyant que leur député ne leur en parlait plus, des paysans vinrent en délégation demander respectueusement des nouvelles de la halte, ajoutant que l’adversaire avait également promis d’en obtenir une…

— La halte ? s’écria le marquis… Comment ?… vous ne le savez pas ? Mais c’est fait, mes braves gens… on commence la semaine prochaine. On a eu de la peine, allez… avec cette vache de gouvernement… qui ne veut rien faire pour le cultivateur…