Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/272

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Il continua :

— Alors, M. le duc d’Orléans m’a pris la main, l’a serrée dans sa main royale, et m’a dit… tout tremblant d’émotion : « Oui, oui… c’est à cheval que je dois rentrer parmi mon peuple… Vous avez raison… Vous êtes un bon serviteur ! » Hein ! qu’en pensez-vous ?… Les voilà, vos voitures…

On approchait des communs… Le marquis s’arrêta et, posant sa main sur l’épaule de Chomassus, il dit :

— Des voitures presque royales… en avez-vous de la veine, mon vieux Chomassus ?…

Chomassus ne savait plus exactement où il en était… Des trônes, des empires, des panaches, des manteaux de pourpre… des hermines… des sceptres… dansaient dans sa tête des sarabandes effrénées… Et, comme le marquis continuait de le secouer par épaule, il soupira :

— Jamais, monsieur le marquis… jamais je n’oserai monter là-dedans…

— Allons donc, mon cher… allons donc, encouragea le marquis… Et vous y serez épatant… Et Mme Chomassus aussi, y sera épatante… Laissez-moi faire… Je veux que vous étonniez le pays par votre chic…

Un palefrenier se montra :

— Ouvre la remise… commanda le marquis… la remise des voitures de M. Le duc d’Orléans…

Chomassus était fort ému. Son cœur battait avec violence.