Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/340

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de génie ?… Des maniaques, des alcooliques, des dégénérés, des fous… Ainsi nous avions cru longtemps que Zola, par exemple, jouissait de la plus forte santé intellectuelle ; tous ses livres semblaient attester, crier cette vérité… Pas du tout… Zola ? Un délinquant… un malade qu’il faut soigner, au lieu de l’admirer… et dont je ne comprends pas que nous n’ayons pu obtenir encore, au nom de l’hygiène nationale… la séquestration dans une maison de fous… Remarquez bien, mes amis, que ce que je dis de Zola, je le dis également d’Homère, de Shakespeare, de Molière, de Pascal, de Tolstoï… Des fous… des fous… des fous… Vous savez aussi que les soi-disant facultés de l’esprit, les soi-disant vertus morales dont l’homme est si fier et que – ô stupidité ! – nous nous acharnons à développer par l’éducation… oui, enfin… l’intelligence, la mémoire, le courage, la probité, la résignation, le dévouement, l’amitié, etc., etc, ne sont que des tares physiologiques graves… des déchéances… des manifestations plus ou moins dangereuses, de la grande, de l’unique, de la terrible maladie contemporaine : la névrose ?… Eh bien, un jour je me posai la question suivante : « Qu’est-ce que la pauvreté ?… Et instantanément, je répondis : « Une névrose, parbleu ! »… D’abord, je raisonnai, et je me dis : « Voyons… voyons… débarrassons-nous de tous les lieux communs, de tous les clichés que depuis des siècles et des siècles