Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/392

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conservent les traditions de la liberté spirituelle, de la joie créatrice… Eux seuls, maintenant, ils savent ce que c’est que la divine fantaisie…

Vous pensez si j’acceptai l’offre que me faisait M. Tarte.

— Mais comment donc ?… Enchanté, monsieur Tarte…

Et je pénétrai, avec lui, dans sa chambre.

Avec empressement, il me désigna un siège, aussi confortable que le permet l’état de la civilisation et du mobilier pyrénéens. Et lui-même s’enfonça, s’engloutit dans un fauteuil.

— Ah ! monsieur, cher monsieur Georges, s’exclama-t-il en s’allongeant voluptueusement… vous ne sauriez croire à quel point je suis heureux… heureux… heureux ! Maintenant, je puis respirer… J’ai un poids de moins sur le cerveau, sur le cœur, sur la conscience… Oui, j’ai en moins, sur le crâne, le poids de la Maladetta et de toute la chaîne des Monts-Maudits. Je suis libre, enfin je me sens léger, volatil, impondérable, si j’ose ainsi dire… Il me semble que je viens de sortir d’un long, angoissant, infernal cauchemar, et que, autour de moi, au-dessus de moi, en moi, c’est la lumière… la lumière… la lumière… Enfin, j’ai reconquis la lumière…

— Et que vous est-il donc arrivé de si extraor-