Page:Mirbeau - Lettres de ma chaumière.djvu/155

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pouvoir nous amuser un peu, voilà donc un fameux crapaud ». Je passai la nuit en cette boîte que le bourreau, sans plus de façon, avait accrochée à un clou, dans son cabinet. Le lendemain de grand matin, le savant me retira de ma prison. Il me déposa sur une table, où se trouvaient beaucoup d’instruments et d’objets inconnus, puis, après m’avoir examiné en tous les sens du bout de sa pince d’acier, il me jeta au fond d’une sorbetière et me gela… Oui, il me gela !… Quand je sortis de la sorbetière, j’étais inerte et plus dur qu’une pierre. « Je crois qu’il est gelé, tout à fait gelé, je le crois », dit le savant. Et, pour s’en assurer mieux, il me frappa à plusieurs reprises avec une règle et me précipita durement trois fois, sur le parquet. Mon corps claquait comme une planchette de bois sec : « Parfaitement gelé, mon garçon », reprit-il. Et l’on me mit au frais.

Je restai ainsi deux ans. L’été, j’avais un supplément de glace car le savant crai-