Page:Mirbeau - Nos domestiques, paru dans l’Écho de Paris, 21 juillet 1891.djvu/3

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Madame

D’où êtes-vous ?

La femme de chambre

De Saint-Brieuc, madame…

Madame (avec une moue de dédain)

De Saint-Brieuc !… Alors vous êtes Bretonne… (Accentuant le dédain.) Je n’aime pas beaucoup les Bretonnes… Elles ne sont pas propres…

La femme de chambre

Moi, je suis très propre, madame…

Madame

C’est vous qui le dites !… Enfin, nous n’en sommes pas là !… Quel âge avez-vous ?

La femme de chambre

Vingt-six ans…

Madame (railleuse)

Vingt-six ans ?… sans compter les mois de nourrice, sans doute ?… Vous paraissez bien plus vieille… Ce n’est pas la peine de me tromper…

La femme de chambre

Je ne trompe pas madame… j’assure bien à madame que je n’ai que vingt-six ans… Si je parais plus vieille, c’est que j’ai été longtemps malade.

Madame (avec dureté)

Vous avez été malade !… Je vous préviens, ma fille, que la maison, sans être dure, est assez importante, et qu’il me faut une femme ayant de la santé.

La femme de chambre

Oh ! mais je suis guérie !…