Page:Mirbeau - Théâtre II.djvu/192

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tions… Je n’avais pas à en discuter les termes avec lui… Je n’avais à prendre d’engagements vis-à-vis de lui… De son côté, il ne m’a promis rien d’autre que de venir ici !… Voilà tout !

Hargand

Je ne le recevrai pas… je ne le reconnais pas… je l’ai chassé de l’usine !

Robert

Vous l’avez chassé… Mais cinq mille ouvriers l’ont élu !…

Hargand

Cinq mille factieux ! Je n’ai pas à leur obéir. Qu’ils se soumettent d’abord !

Robert

Et s’il vous apportait la paix ?

Hargand

Au prix de concessions absurdes et déshonorantes ?… Non… non !… C’est une folie que d’y songer… (Il se lève et se remet à marcher dans la pièce. Silence.) Nous nous sommes dit, tout à l’heure, des paroles inutilement blessantes… Cela ne remédie à rien… et cela fait du mal !… Parlons raison… (Il vient s’appuyer le dos à la cheminée.) Je ne crois pas être un mauvais homme… Je t’ai prouvé que je n’étais pas, non plus, un tyran… que j’avais, au contraire, un sentiment très vif de la liberté des autres… Je t’ai laissé te développer, selon toi-même et dans le sens de ta nature… Tu ne peux pas me reprocher d’avoir jamais contrarié tes idées…